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22 février 2009

Content, pas content

A la suite d’un feu d’artifices tiré à l’occasion du nouvel an chinois, un incendie impressionnant a ravagé le TVCC, annexe hôtelière du CCTV de Pékin, réalisée par l’agence OMA sous la conduite de Rem Koolhaas et Ole Scheeren. Alors que le bâtiment devait être ouvert au public début mai, les effets pyrotechniques ont littéralement mis le feu aux matières premières présentes sur le site pour la réalisation des aménagements intérieurs, transformant la tour de 30 étages en véritable torche. Le bâtiment en flammes a alors constitué le bouquet final de ce feu d’artifices.



Responsable de cette manifestation, la chaine nationale chinoise n’a pourtant pas couvert cet évènement dramatique. Alors que censure d’Etat et limitation des libertés individuelles sont des sujets sensibles et toujours d’actualités en Chine, ce sont les blogs et les plateformes de partage de contenu qui ont assuré l’essentiel de l’information concernant l’incendie : vidéos, témoignages, etc… Avec humour, de nombreux internautes ont utilisés les images mêmes de la catastrophe pour moquer la toute puissance de la télévision chinoise.



Or, l’iconographie développée sur internet est surprenante car elle reprend les codes d’expression développés par Rem Koolhaas et l’agence de graphisme &&& dans l’ouvrage hybride Content, décrit pas ses concepteurs comme « a bookazine ». Captures d’écrans, images sales, trash ou volées, photomontages grossiers, autodérision assumée, références à une culture populaire (science-fiction, consumérisme, pornographie), rien ne distingue les images trouvées sur le web de celle de l’ouvrage présentant le travail de l’OMA.



Paru en 2004, Content avait pour propos une accélération de l’histoire et une culture de l’évènement. Son contenu, organisé sous l’antienne « Go East », envisageait la pratique de l’OMA comme une action géopolitique. Sous ces deux aspects, l’incendie du TVCC semble apporter un post-scriptum involontaire, tragique et magistral au voyage vers l’orient présenté dans le livre de l’OMA. De plus, à travers cette esthétique globale des réseaux d’information, des anonymes, témoins hasardeux des évènements, contribuent de fait au prochain livre de Rem Koolhaas.


13 février 2009

Les grands travaux ?

Selon l’adage de Martin Nadaud, « Quand le bâtiment va, tout va », François Fillon a présenté la semaine passée le plan de relance du gouvernement d’un montant global de 26 milliards d’euros. Si la majeure partie du plan est consacrée au soutien aux entreprises via des mesures fiscales, le programme d’investissement public annoncé à cette occasion représente tout de même 4 milliards d’euros. Touchant à de nombreux domaines de l’Etat, il se concrétise en grande partie par des interventions architecturales, immobilières ou urbaines.

Décrits par régions, ces grands chantiers du président sont relativement équilibrés :
1160 M€ : Logement social et rénovation urbaine
870 M€ : Infrastructures
730 M€ : Recherche
620 M€ : Patrimoine
275 M€ : Equipements


Pourtant, lorsqu’il concerne la réfection couche de roulement de la RN 47 dans le Nord Pas de Calais, la modernisation du restaurant universitaire du Technopôle de Metz, la réhabilitation des archives départementales de la Nièvre ou le cofinancement de logements sociaux à Lyon-la Duchère, le plan de relance ressemble plus à rééquilibrage qu’à une nouvelle dynamique. En effet, ces travaux correspondent peu ou prou à des chantiers ralentis ou bloqués par le désengagement de l’Etat et par les économies qu’il cherche à réaliser à toutes les échelles. A travers ce plan d’investissement, l’Etat apparaît finalement moins comme entrepreneur et volontariste qu’en défaut sur ses prérogatives régaliennes et ses missions de service public.

Alors que la politique architecturale et urbaine de De Gaulle fut marquée par un effort de construction de logements sans précédent et par la création d’infrastructures primordiales : du périphérique parisien aux autoroutes et à l’aéroport de Roissy. Alors que celle de François Mitterrand s’est concentrée sur de grandes institutions culturelles pour promouvoir le rayonnement international de la France. La politique architecturale et urbaine du président Sarkozy, privée du développement de La Défense par la crise financière, parait floue et quasi-inexistante. Plus grave, elle semble même avoir abandonné l’ambition d’une action sur l’espace comme facteur de changement social, de dynamisme économique ou d’une production culturelle remarquable.


A lire aussi :
http://www.lemonde.fr/archives/article/2009/02/07/de-la-crise-economique-a-la-crise-de-l-architecture_1152151_0.html
http://www.relance.gouv.fr/

A voir et à écouter :
http://www.lemoniteur.fr/153-profession/video/600352-les-architectes-et-2009
http://www.deezer.com/track/2148950

9 février 2009

Europan sur le bec !

Concours bisannuel d’urbanisme, Europan est devenu depuis le milieu des années 1980 un laboratoire pour les politiques urbaines, un tremplin pour de jeunes équipes d’urbanisme et un lieu d’innovation à l’échelle européenne. Les palmarès des différentes éditions ont notamment distingué le groupe hollandais MVRDV, les espagnols Cero.9, les croates Njiric+Njiric ou les français Djamel Klouche ou BNR (Babled- Nouvet- Reynaud). Lancée la semaine passée, la 10ème session de cette consultation se concentre sur trois thématiques : régénération, revitalisation, colonisation.


Or, la profondeur historique de ces trois mots rend ces concepts bien maladroits pour ne pas dire dangereux. En effet, ces notions renvoient au registre d’une identité nationale épurée, assumée voire revendiquée. Ainsi, régénération est un mot fréquemment utilisée par le régime de Vichy et le Maréchal Pétain, comme dans cette allocution du 30 octobre 1940 : « Français, J'ai rencontré, jeudi dernier, le chancelier du Reich. […]Une telle entrevue n'a été possible, quatre mois après la défaite de nos armes, que grâce a la dignité des Français devant l'épreuve, grâce à l'immense effort de régénération auquel ils se sont prêtés, grâce aussi à l'héroïsme de nos marins, à l'énergie de nos chefs coloniaux, au loyalisme de nos populations indigènes. La France s'est ressaisie. »

Le substantif revitalisation a été formé au début des années 1920 dans cette même double perspective, à la fois morale et organiciste. Enfin, le mot colonisation se passe de commentaires tant son histoire, son économie et la persistance des inégalités qu’elle à produite rend délicate voire impensable son application au champ de l’urbanisme.

Sans polémiquer davantage sur cette ombre planant sur la session Europan 10, on s’en tiendra au titre principal du concours, nettement plus optimiste et progressiste : Inventer l’urbanité !


A voir :
http://www.europan-europe.com/e10/fr/home/home.php
http://pages.livresdeguerre.net/pages/sujet.php?id=docddp&su=48&np=102
http://mots.revues.org/index5593.html

4 février 2009

Brad Pitt et les aspirants

Récemment, de nombreux journalistes se sont intéressés sur l’intérêt et les activités architecturales de Brad Pitt. De son implication dans l’association Make It Right, qui suite à l’ouragan Katrina, a notamment enjoint MVRDV de réaliser des prototypes de maisons à la Nouvelle-Orléans à ses stages répétés dans l’agence californienne de Frank O. Gehry. De sa participation à la campagne de préservation de la Falling Water House de Franck Lloyd Wright au second prénom de sa fille, Shiloh Nouvel, nommée en hommage à l’architecte hexagonal Jean Nouvel.


A l’instar de Brad Pitt, de nombreuses personnalités ont rêvé voire débuté des études d’architecture. En voici un petit panel, qui permet de penser que si tout les chemins mènent à Rome, des études d’architecture peuvent mener à tout (et parfois à n’importe quoi).

Antônio Carlos Jobim, Musicien brésilien, Rio de Janeiro.
Aishwarya Rai, Actrice indienne et Miss monde 1994, Raheja College, Bombay.
Carla Bruni, Etudes en arts et architecture, Paris.
Courtney Cox, Actrice américaine, Mount Vernon College for Women, Washington, D.C.
Milo Manara, Auteur de bandes dessinées, Faculté d’architecture, Venise.
Mohamed Atta, Membre des attentats du 11 septembre 2001, Université du Caire.
Nicolas Godin, Membre du groupe pop-électronique Air, Ecole d’Architecture, Versailles.
Odilon Redon, Peintre symboliste français, Ecole des Beaux-Arts, Paris.
Paco Rabane, Grand couturier, Ecole des Beaux-Arts, Paris.
Ratan Tata, Patron du conglomérat indien TATA, Cornell University, Ithaca.
Serge Gainsbourg, Auteur, compositeur et interprète français, Ecole des Beaux-Arts, Paris.


A voir :
http://www.makeitrightnola.org/
http://www.architecturaldigest.com/magazine/toc/2009/01/toc_20081201
http://www.lexpress.fr/culture/architecture-patrimoine/architecture/les-realisations-de-brad-pitt-l-architecte_736365.html